Google Chrome : multitudes et beaufitude
Si j’ai beaucoup d’indulgence avec Madame Michu qui utilise Safari sur Mac OS X et Internet Explorer sur Windows, j’ai beaucoup plus de difficulté à comprendre que 90% de mes étudiants de 3e année continuent à employer Google Chrome, à la manière de Madame Michu qui, à l’occasion d’un quelconque téléchargement, s’est vu imposer Google Chrome comme navigateur par défaut !
Faire le choix de la rationalité !
J’ai pour ma part quatre critères qui conditionnent le choix de mon navigateur :
- la confidentialité des données ;
- la sécurité ;
- la vitesse ;
- les extensions qui accompagnent l’utilisation du navigateur.
Il suffit de lire les conditions d’utilisation des logiciels et services Google pour comprendre que la firme de Moutain View se comporte en voyou de l’Internet. Je vous incite à lire cet article que j’avais rédigé le 26 janvier 2012. Il n’a pas pris une ride. Pourquoi mes étudiants ne semblent-ils accorder aucune importance aux données personnelles qui les accompagnent dans leur navigation ?
Sur le plan de la sécurité, cela fait deux années consécutives que Google Chrome cumule le plus de failles de sécurité. Oui, Chrome est la poubelle des navigateurs en termes de sécurité !
Concernant la vitesse, les tests que j’ai effectués sur ma propre machine, ceux que j’ai réalisés avec les étudiants vendredi après-midi vont tous dans le même sens. Firefox 27.0 pulvérise Google Chrome 34.0 sur le temps de chargement et de rechargement des pages des sites que nous visitons.
Dernier point : les extensions ! Malgré l’engouement pour Chrome, le développement d’extension se fait très souvent à partir de Firefox et se trouve transposé sur Google Chrome. L’inverse est encore très rare et ne concerne que des fonctionnalités propres aux services Google ou à des gadgets très inutiles.
L’infatuation aux marques
Comment, donc, un étudiant doté de raison peut-il continuer à utiliser Google Chrome ? L’habitus, nous aurait sans doute dit Pierre Bourdieu. Mais ce qui me semble plus inquiétant, c’est l’incapacité de jeunes – qui n’ont pas les habitudes d’un vieux con comme moi – à baser leur choix sur des critères rationnels. Et lorsque j’évoque mes tests, mes analyses, c’est leur mauvaise foi qui apparaît en premier : « vous ne mesurez pas la même chose. » Certains d’entre eux parlent même d’ergonomie. Alors que, dans les années 90, tout bon informaticien qui se respectait s’identifiait à Microsoft, aujourd’hui nos jeunes gaillards, s’identifient à Apple et à Google. J’achète, je consomme, donc je suis. La belle affaire ! Et attaquer Google Chrome, c’est en creux comme si nous les attaquions en tant qu’êtres. Se subjectiver – et donc s’objectiver – par les marques… Baudrillard en avait déjà parlé dans les années 1970. Quelle est, au juste, leur degré d’autonomie ?
A lire : « Les Français & la protection des données personnelles ».