Produire français aussi dans l’informatique !

A l’heure où les entreprises externalisent leur messagerie, leur stockage, leur bureautique à Microsoft et à Google, la question que nous avons à nous poser est de savoir si nous allons disposer encore de services informatique dans notre pays. Inutile ici de parler d’industrie informatique : nous n’en avons plus !

Un lourd passif

Les excès tarifaires des SSII dans les années 1998-2002 auront pesé lourdement sur l’image des « informaticiens », au point où aujourd’hui les salaires perçus par des plombiers ou des maçons sont, sans doute, bien au dessus de ceux des administrateurs des serveurs Windows 2003 et 2008 ! Alors, la nouvelle mode pour ces jeunes – et ces moins jeunes – en mal de reconnaissance sociale, qui voient leurs aînés gagner beaucoup plus d’argent sans faire grand chose, serait de devenir chef de projets. Être calife à la place du calife, une très vieille histoire… La mode est à celui qui en fera le moins possible. Ce serait devenu la marque de l’intelligence de toute une société.

Un glissement vers le bas

Le choix du logiciel propriétaire par les informaticiens eux-mêmes est la traduction de cette volonté d’en faire le moins possible. Du coup, les métiers ont changé. Ils sont devenus moins techniques. Nous construisons des systèmes d’information, guidés par nos clics de souris. L’utilisation des logiciels propriétaires a libéré des gisements de productivité qui se sont souvent soldés par des baisses de salaires et un glissement vers des métiers de tâcherons ! Nous consommons du logiciel. Compte tenu des prix des matériels fabriqués dans le sud-est asiatique, on ne répare plus : on remplace. Alors, nous consommons du matériel.

Nous avons sombré dans une logique de consumacteur. En 2000,  les délires visionnaires de la stratégie de Lisbonne élaborée par quelques eurocrates, voulaient instituer la société de la connaissance partout en Europe. Si elle se construit, la société de la connaissance est en train de se faire… sans nous. Dans l’informatique aussi, nous ne fabriquons plus rien.

« Les imbéciles ont pris le pouvoir, ils iront jusqu’au bout. »

"Les imbéciles ont pris le pouvoir, ils iront jusqu’au bout !"Comme naguère pour la paie, puis pour la comptabilité, les dirigeants-actionnaires des entreprises françaises considèrent aujourd’hui que l’informatique n’est plus leur métier. Jusqu’où iront-ils ? Compte tenu de la haute valeur stratégique que revêtent l’information, la vitesse et la capacité à la traiter dans un monde en hyper-concurrence et en accélaration, cette vision semble tout simplement relever du contre-sens absolu ! Avec l’augmentation des débits et la généralisation de l’Internet, les responsables informatiques issus des écoles de commerce font le choix  des services du cloud proposés par Google ou Microsoft. Ils continuent de confondre baisse des coûts et productivité. Ils ont été d’ailleurs bien aidés en cela par une majorité d’informaticiens qui sont à l’économie ce que le pigeon ramier est au transport aérien. Ces brillants diplômés de nos écoles de commerce qui font aujourd’hui office de responsables informatiques oublient au passage que ces entreprises – américaines – sont soumis au Patriot Act. Leur cupidité résiste, de fait, à toute forme d’intelligence ! Et nous sommes loin d’avoir vu l’expression de tout leur « talent » en la matière. Il est sans fond.

Trois axes pour produire français dans l’informatique

L’une des premières sociétés à avoir construit son modèle économique sur le logiciel libre, c’est évidemment Google. Vendre de la gratuité… Dans les écoles qui préparent nos jeunes aux métiers de l’informatique, nous continuons, empreints que nous sommes d’un monde qui disparaît, à continuer de les former massivement au logiciel propriétaire. Que voulez-vous faire de tous ces formateurs et enseignants qui n’ont fait que du Microsoft depuis 20 ans, parfois par pure paresse ? Quel est le modèle pour nos jeunes ? Le logiciel libre, quant à lui, exige que nous disposions d’informaticiens et d’entreprises, qui fassent le choix de la technique.

Réinternaliser l’informatique suppose également que les entreprises disposent de la fibre et du très haut débit, afin de pouvoir héberger tous leurs services informatique à moindre coût. Les prix dans le cloud  sont très dépendants du prix de l’énergie. Ils ne resteront pas bon marché bien longtemps. Or, avec les lois LCEN, DADVSI, LOPSI et HADOPI, le pouvoir politique semble aujourd’hui plus préoccupé par la préservation de la rente de quelques ayants-droits que du développement des technologies et des services informatique dans notre pays. La fibre nous permettra de télécharger encore plus vite. Le paradoxe, c’est que notre cinéma ne s’est jamais aussi porté.

Il nous faut enfin, si nous voulons développer l’informatique et les nouvelles technologies, mettre en place un Small Business Act en France, permettant aux TPE de soumissionner à des appels d’offre, dont les concepteurs semblent avoir parfois quitté le plancher des vaches. Il faut bien justifier de son emploi. Les nouvelles règles d’attribution des marchés publics n’ont défini aucune règle quant à la définition des lots. Du coup, les collectivités continuent de choisir leurs fournisseurs, s’adaptant à un cadre de plus en plus lourd et coûteux pour le contribuable.

 

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